"Hommage et réparation".

2 vol. in-4° obl., 26 x 35 cm : [20], [25] pp., en français, encre noire sur papier vélin teinté réglé à la mine de plomb, serpentes (qqs piqûres).

Cartonnages demi-percaline bleu marine de l'ép. (us., dos fragilisés, en partie déreliés).

Manuscrit original inédit d'une conférence adressée à un public estudiantin ("Mon Révérend Père, Messieurs", "mes honorables condisciples") par P. Buysse (1877-1938), alors étudiant au Grand Séminaire de Gand. Ordonné prêtre en 1900, il fut curé à Sint-Martens-Latem et à Gand où il devint directeur de l'Institut Saitn-Amand et chanoine du chapitre cathédral. Il a publié de nombreux textes à caractère apologétique. Le style de notre manuscrit est anti-académique ("Si Bismarck a été gentil à la Conférence de Berlin, cela n'a pas été pour des prunes !"), le ton polémique et le tableau de la colonisation du Congo extrêmement critique. Il tente de démontrer que l'oeuvre est vouée à l'échec sur tous les plans, sans épargner personne excepté le roi Léopold II : "Aux écrivains qui ont voulu traiter avec bienveillance son éléphant chéri, notre bien aimé souverain a accordé une audience et un crachat de son ordre. Moi je n'espère pas autant, je ne demande rien, ni la faveur d'être passé en revue ni une décoration", "En dépit des fantaisies journalistiques l'oeuvre commerciale [sic] du Congo ne prendra jamais une place honorable parmi ses consoeurs", "En confiant à Stanley le commandement supérieur de l'expédition, les ronds-de-cuir de la rue Brederode [siège de l'administration de l’État indépendant du Congo] avaient certes leurs petits motifs. Sa brutalité à l'égard des Européens, son coeur de pierre, le peu de cas qu'il faisait de la vie des autres, en avaient fait un homme détesté malgré sa brillante carrière d'explorateur [...]", il s'étend longuement sur le cas d'une "malheureuse femme zanzibarite faisant partie de l'expédition de Stanley" et victime de sa "brutalité", dénonce les exactions commises par le capitaine Grant Elliott, "tigre à face humaine" dont les troupes ont semé "le carnage et la désolation chez les nègres", "la conduite scandaleuse des blancs qui rendent la prostitution obligatoire", "les punitions corporelles [qui] revêtent au Congo un caractère inhumaine [sic] qu'elles n'ont pas ailleurs", etc. Le second vol. est consacré à "l'oeuvre religieuse" au Congo belge, "partie délicate de mon travail", d'autant plus qu'un de ses oncles, "cet ange courageux", est missionnaire dans la colonie. Le bilan n'est guère encourageant et "une grande part de responsabilité retombe sur l'autorité religieuse" dont il souligne l'"incapacité", le "peu de courage" et le "manque de fermeté". Curieusement, l'orateur disculpe le roi : "Vive Léopold II roi des belges et du Congo ! L'administration voilà la coupable, la seule coupable. Elle a fait du pays conquis une gigantesque fumisterie, une hécatombe monstrueuse, une ignoble farce, une odieuse exploitation [...]. Ce n'est pas une oeuvre de civilisation pure ou de colonisation réelle, mais une affaire commerciale d'exploitation des noirs et de leur pays".
Réf. Biogr. nat. XXXIV:150-152.